Shantideva’s
Bodhicharyāvatāra
བྱང་ཆུབ་སེམས་པའི་སྤྱོད་པ་ལ་འཇུག་པ།།
Groupe d'Etude guidé par Vén. Lama Sangyay Tendzin
Session 75 - Samedi 21 octobre 2023
Chapitre huit : Concentration méditative (Stabilité mentale d'une grande portée) : 187 Strophes
REFUGE | MANDALA | REQUETE des ENSEIGNEMENTS
Invocation par le Lama de l’assemblée des Bouddhas et des détenteurs de Lignée.
Courte pratique de Quiétude Mentale – Développement de la Bodhicitta
Bonjour. Après avoir présenté un long exposé de Shantideva sur « Abandonner le désir d'avoir un amant », Shantideva révèle maintenant les nombreuses blessures qui résultent de l'attachement.
Strophe 71 :
Cette chose impure
Ne s’obtient pas sans en payer le prix :
À se la procurer, on s’épuise
En attirant les souffrances des mondes inférieurs !
Trouver un partenaire de vie comporte souvent son propre ensemble de coûts, qu’ils soient matériels ou émotionnels. Des investissements financiers élevés peuvent être nécessaires sous la forme de métaux précieux, de bétail ou d’autres actifs.
Les efforts déployés pour acquérir ces ressources, ainsi que les responsabilités supplémentaires telles que l’organisation de fêtes et l’acquisition d’objets personnels, tendent à générer une augmentation des défis et du stress. De telles activités affectent non seulement le bien-être d’une personne au cours de cette vie, mais peuvent également avoir des répercussions sous la forme de souffrances futures. »
Strophe 72 :
Enfant, on ne peut accumuler de richesses :
Une fois adulte, où trouvera-t-on son plaisir ?
La vie passe à la poursuite du gain,
Puis on est vieux, et le désir ne sert plus à rien.
Les jeunes enfants n’ont pas les moyens d’amasser des richesses, manquant ainsi les joies découlant de la possession. À mesure qu’ils deviennent de jeunes adultes, la recherche d’un partenaire de vie devient tout aussi difficile.
Leurs journées sont principalement consacrées à gagner, accumuler et sauvegarder leurs ressources, que ce soit par l’agriculture ou le commerce. En atteignant la vieillesse, la capacité à tirer du plaisir de ses désirs diminue. Dans chaque phase, le temps ou la capacité agit comme une contrainte.
Strophe 73 :
Les uns, pleins de vulgaires appétits,
S’épuisent tout le jour à la tâche,
Et quand, exténués, ils rentrent chez eux,
C’est pour dormir comme des cadavres.
En effet, il existe des individus accablés par des désirs incessants, qui consacrent entièrement leurs journées à des activités laborieuses. Dès l’aube, ils labourent la terre, récoltent les récoltes et s’occupent de leur bétail. À la tombée de la nuit, ils rentrent chez eux, épuisés physiquement et émotionnellement, succombant à un sommeil qui ressemble à un état d’apathie. Au réveil, ils reprennent leur labeur incessant. Leur existence est caractérisée par une lutte et des difficultés perpétuelles.
Strophe 74 :
Les autres s’épuisent en longs périples
Et ont le mal du pays.
Une année peut passer sans qu’ils voient
Leur femme et leurs enfants qu’ils désirent tant retrouver.
De nombreux individus s'aventurent à l'étranger pour de longues périodes pour des raisons professionnelles ou des activités moins vertueuses, faisant face à d'importants défis tout au long de leur périple. Ces voyageurs sont coupés de leur patrie et se retrouvent physiquement et émotionnellement épuisés. Aspirant à retrouver leurs familles et leurs amis, ils sont souvent incapables de les rejoindre pendant de longues périodes. Il va sans dire que leurs désirs restent insatisfaits.
Ce passage met en lumière les sacrifices et le coût émotionnel associés aux longs voyages pour des raisons professionnelles ou autres. Le sentiment d'isolement et de fatigue émotionnelle sert de rappel poignant que la connexion humaine est inestimable et souvent négligée dans la quête d'objectifs matériels ou extrinsèques. Ceci pourrait servir de mise en garde prônant une approche équilibrée des entreprises de la vie.
Strophe 75 :
Certains, par ignorance,
Sont vendus pour leur propre bien,
Mais le vent des tâches absurdes d’autrui
Les emporte sans qu’ils réalisent leur souhait.
Cette strophe offre une perspective de mise en garde qui peut servir d’incitation à l’introspection et à la pleine conscience, nous rappelant de considérer attentivement les conséquences de nos actions, tant pour nous-mêmes que pour les autres, dans cette vie et dans les vies futures.
L’implication est que pour un véritable bien-être, il faut cultiver non seulement les conditions extérieures, mais aussi les vertus et la sagesse intérieures.
Strophe 76 :
Certains se vendent à d’autres
Dont ils deviennent les esclaves impuissants.
Les femmes accouchent sous un arbre,
Dans un endroit désert, n’importe où.
Les individus, motivés par le désir de soutenir leurs filles, peuvent les placer involontairement dans des situations malheureuses, ne voyant pas d'autres moyens de soutien. Bien qu'animés de bonnes intentions, ces parents les orientent ainsi involontairement sur un chemin dépourvu du bonheur recherché pour elles.
Dans des foyers inconnus, ces jeunes femmes se voient souvent confier des tâches insatisfaisantes qui ne leur offrent ni loisirs diurnes ni repos nocturne.
Poussées par la force du karma négatif, semblable à la poussée du vent, elles s'engagent dans des comportements préjudiciables et un discours nuisible qui mènent à la souffrance, compromettant leur bien-être dans cette vie et au-delà.
Dès lors, elles se retrouvent enceintes et contraintes d’accoucher isolées de leur famille, reléguées dans la solitude dans des lieux hostiles.
Strophe 77 :
Les fous qu’aveugle le désir
Partent à la guerre pour gagner leur vie
Tout en craignant de la perdre ;
Ou bien, pour le profit, ils se retrouvent esclaves.
Les hommes, égarés par les attraits sensoriels et poussés par le désir de richesse et de confort matériels, se livrent à des occupations telles que le vol, le vol et le service militaire. Malgré les appréhensions concernant leur propre sécurité, ils choisissent de chercher fortune dans la guerre.
Assoiffés de victoire, ils s’alignent sur des dirigeants durs et malveillants, leur offrant un tribut en guise de protection. Vivant dans un état d’appréhension perpétuelle, ils finissent par devenir assujettis à ceux-ci.
Strophe 78 :
Mus par le désir, certains
Sont mutilés, d’autres empalés,
D’autres encore percés
Par des lances ou brûlés.
En raison de leur soif de plaisirs sensoriels, certains individus font face à des conséquences désastreuses, allant de dommages corporels à la mort, dans cette vie et la suivante.
Par exemple, un papillon est consumé par le feu en raison de son attirance pour la lumière, un cerf tombe victime d'une flèche fatale captivé par le son, une abeille est prise au piège dans une fleur attirée par son parfum, un poisson est hameçonné en raison de son goût pour certaines saveurs, et un éléphant s'enlise dans la boue à cause de son affinité pour certaines expériences tactiles.
De tels exemples servent de contes de mise en garde, nous incitant à réfléchir sur les pièges associés aux désirs sensoriels et ainsi à nous libérer de ces attachements. Dans les 6 slokas suivants, Shantideva conseille "D'abandonner l'attachement à la richesse et aux possessions."
Strophe 79 :
Sachons que le tourment de les gagner, les conserver et les perdre
Fait des richesses une infortune sans fin.
Ceux que l’attachement aux richesses distrait
N’échapperont jamais aux souffrances du devenir.
Ce sloka met en avant les pièges liés à la possession matérielle. Acquérir, maintenir et finalement perdre des biens impliquent des défis et des souffrances considérables. Ces activités exigent une vigilance constante, affectant à la fois le bien-être physique et la paix mentale. Notamment, l'obsession pour la richesse matérielle éloigne de la capacité à s'engager dans des pratiques spirituelles significatives, comme les trois formations du chemin.
Le commentaire met en garde que la préoccupation pour les possessions cause non seulement des difficultés immédiates, mais peut également entraver la croissance spirituelle, affectant ainsi à la fois cette vie et les existences futures. Il suggère que la véritable liberté de la souffrance réside dans le détachement des biens matériels et la concentration sur la pratique spirituelle.
Dans son commentaire, Kunzang Palden cite le vers suivant tiré du Suhrillekha (*):
« Nous souffrons proportionnellement à la propriété que nous possédons. Qui a peu de désirs a peu de douleurs.
Les maux de tête qui affligent les rois nagas sont égaux au nombre de têtes qu'ils possèdent ».
(*) Lettre à un ami de Nagarjuna.
Strophe 80 :
Nombreuses sont les misères de celui
Qui désire, et ses gains, aussi maigres
Que les quelques bouchées d’herbe
Grapillées par le bœuf qui tire son chariot.
Les individus accablés par de nombreux désirs endurent des souffrances considérables pour des moments de bonheur éphémères. Le sommet de leur joie se limite au bref instant où leur conscience rencontre l’objet de leur désir.
Ces individus peuvent être comparés à des bœufs tirant une charrette pleine de foin : ils savourent une brève bouchée d'herbe pour se retrouver secoués par les mouvements brusques de la charrette, entraînant inconfort et difficultés.
Strophe 81 :
Pour un profit minime
Accessible même au bétail, l’homme
Tourmenté par son karma détruit les libertés
Et les richesses parfaites qu’il avait obtenues à grand-peine.
Ce sloka résume l'essence de la préciosité de la vie humaine. Le coût de la poursuite des conforts matériels au détriment de la croissance spirituelle est effectivement une préoccupation profonde, car il met en péril la rare opportunité d'illumination que la naissance humaine nous offre.
Le commentaire de Kunzanf Palden cite le Shishyalekha, un texte dans lequel Chandragomin explique la position unique que les humains ont pour s'engager dans le Dharma, une opportunité non disponible même pour les êtres célestes :
S'engager dans le Tripitaka, embrasser les trois formations (conduite éthique, discipline mentale et sagesse), pratiquer la sadhana sont tous des pratiques inestimables pour tirer le meilleur parti de notre existence humaine. Ignorer ces enseignements et pratiques, c'est comme gaspiller un cadeau précieux.
Strophe 82 :
Ce que nous désirons périra
En nous poussant dans les enfers.
Ce n’est pour rien de grand que de petits ennuis
Nous éreintent continûment.
La satisfaction puisée dans les plaisirs matériels ou sensoriels est de nature transitoire et incertaine. Tout ce qui voit le jour est voué à l'éphémère : la naissance est inévitablement suivie par la mort ; les liens créés se dénoueront un jour ; les ressources amassées finiront par s'épuiser ; et même la plus haute des positions sociales peut être anéantie.
Bien conscients de ces réalités, nous persistons néanmoins à privilégier ceux que nous affectionnons et à agir en défaveur de ceux que nous réprouvons ; nous nous engageons dans diverses transactions économiques et dépendons d'apports matériels.
Ces actes entraînent souvent l'accumulation d'un karma défavorable, menant à des renaissances difficiles dans des sphères moins élevées. De tels investissements fournissent peu de bénéfices, que ce soit dans cette vie ou dans les cycles futurs de l'existence.
L'énergie considérable que nous consacrons au cycle incessant du samsara aboutit en fin de compte à de la souffrance et des complications, plutôt qu'à une satisfaction durable.
Strophe 83 :
S’il suffit d’un millionième
De ces difficultés pour réaliser la bouddhéité.
Les êtres de désir souffrent plus que ceux
Qui œuvrent à l’Éveil, mais ils n’atteignent pas l’Éveil.
Si nous choisissons de suivre la voie des bodhisattvas, atteindre l’illumination ne nécessiterait qu’une fraction des luttes et des efforts inutiles que nous vivons habituellement.
En effet, les efforts déployés par ceux qui poursuivent les désirs du monde sont souvent plus intenses et soutenus que ceux requis lors du voyage du bodhisattva, mais ils ne nous rapprochent pas du véritable éveil.
Strophe 84 :
Si l’on songe aux souffrances infernales,
On voit que les armes, le poison, le feu, les précipices
Et les ennemis ne sont en rien comparables
Aux malheurs engendrés par le désir.
Si nous prenons en compte notre bien-être, il vaut la peine de méditer sur les défis sévères rencontrés dans des états de souffrance, tels que les royaumes infernaux ou les conditions auxquelles font face les esprits affamés et les animaux. Ces états sont la conséquence ultime d'un attachement excessif aux désirs mondains.
Qu'il s'agisse de préjudices physiques ou d'autres défis, les difficultés que nous pourrions rencontrer aujourd'hui sont mineures en comparaison. Elles peuvent conduire à la fin de cette vie, mais ne nous font pas renaître dans ces royaumes plus durs.
Nous nous arrêterons ici aujourd'hui. La semaine prochaine, nous aborderons le sujet suivant, une réflexion sur l’excellence de la solitude.
Pratiquons la quiescence mentale pendant quelques instants, avant de dédier notre mérite pour le bien de tous.
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